lundi 1 octobre 2012

L'interrogatoire

Après 20 ans de police passées dans différents services (brigade de nuit, brigade anti-criminalité, services d'investigation, service de commandement...) on pense maîtriser toutes les techniques d'interrogatoire. De la victime choquée à qui il faut poser les questions justes avec tact et diplomatie jusqu'à "l'indic" à qui il faut tirer les vers du nez sans se faire embrouiller, en passant par le criminel qui aimerait bien "s'allonger" mais à peur des conséquences de ses "confidences", on fini par connaître toutes les ficelles de la rhétorique policière. Là où je me trouve désemparé, c'est quand il s'agit de faire dire à ma fille ce qu'elle a fait durant sa journée à l'école :
- Tu as passé une bonne journée ?
 - OUI...
Si j'insiste un peu :
 - Qu'est-ce que tu as fait aujourd'hui ?
 Ses réponses sont toujours évasives du style :
- Plein de choses...
- Tu as fait du dessin, de la peinture, tu as lu des histoires ?
- Oui, un peu... ! 
En plus je ne peux même pas faire le coup du méchant et du gentil pour la faire avouer comme dans les films vu que je suis tout seul et que j'ai jamais su faire le méchant !
J'ai beau tenter tous les subterfuges qui me passent par la tête, rien n'y fait :
- J'ai vu ta copine Agathe, elle a dit que vous aviez fait de la gymnastique...
- OUI, UN PEU... ! !
Mais je ne lâche rien :
- J'ai vu sur le menu que vous aviez mangé du poulet et des frites ce midi, c'était bon ?
- Oui, UN PEU ! ! !
Finalement la semaine dernière, je suis tombé sur une émission matinale qui parlait des enfants et de l'école.  Quand une mère de famille s'est inquiété du manque de communication de ses enfants sur leur journée passée, le psy lui a répondu que c'était leur jardin secret et que la "méthode interrogatoire" à la sortie était vouée à l'échec.Ce n'est pas forcément qu'ils ont quelque chose à cacher mais qu'ils font comme les adultes : ils séparent la vie au "travail" et la vie à la maison. Cela tient aussi au fait que les enfants reproduisent ce que font ou disent leurs parents sur leur vie professionnelle et c'est vrai que raconter son boulot de flic à une gosse de 4 ans, c'est pas toujours évident... C'est pour ça que j'en ai jamais vraiment parlé ou alors je répondais à ses questions de manière évasive... COMME ELLE !

Je me suis dit que désormais je lui dirais en quoi consiste mon travail, avec des mots simples et choisis. Et puis je me suis senti soulagé : ça veut dire que j'ai peut-être pas perdu la main en matière d'interrogatoire...

3 commentaires:

  1. Mon fils a le même âge que ta fille. D'abord je me suis demandé si je devais lui dire, mais il a vite compris tout seul. Je reste très simple: j'arrête les méchants, je n'attaque pas, je me défends. etc Mon père était flic aussi, j'ai compris ça sur le tard.

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  2. Féliciations pour ce blog que je découvre.
    Et oui les enfants sont comme cela, si on les harcèle de trop ou trop vite, ils se referment. Il suffit parfois d'une étincelle pour qu'ils parlent de tout et de rien de leur journée, suffit d'écouter et de rester neutre, ne pas juger, ne pas conseiller, juste écouter.

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  3. J'ai compris maintenant : après l'école on parle de tout et de rien et c'est le week-end qu'on apprend au détour d'une phrase ce qu'elle fait à l'école !

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